Pesticides et biodiversité

Voici le texte qui a été lu en public sur la place du Parvis à Coutances
lors du 15e rassemblement du mouvement
Nous voulons des coquelicots,
ce samedi 7 décembre 2019.

Abeille Halictus sp. sur coquelicot. (Photo Philippe Scolan)

Aujourd’hui, je voudrais vous parler des abeilles et plus largement de la biodiversité.

Si vous n’avez pu voir l’exposition « Abeilles sauvages » organisée par Manche-Nature à l’espace Saint-Nicolas en mai dernier, sachez qu’il existe de très nombreuses espèces d’abeilles.

Tout le monde connaît l’abeille domestique qui est élevée pour nous fournir du miel, mais il en existe près de mille autres en France métropolitaine.

Pour bien les différencier d’Apis mellifera, l’abeille domestique, on regroupe toutes les autres espèces sous le terme d’abeilles sauvages. Seules quelques-unes vivent en société comme les bourdons et plus de 90 % sont solitaires et nichent de différentes manières dans le sol, dans les murs, les tiges creuses et tout un ensemble de cavités naturelles ou d’origine humaine. Les gîtes à abeilles ou hôtel à insectes offrent ainsi à quelques espèces des lieux de nidification avec un rôle pédagogique permettant d’observer facilement ces insectes peu connus.

Dans notre département, les recherches menées nous ont permis de dénombrer plus de 270 espèces différentes et d’en présenter la cartographie communale sur notre site internet. Nous connaissons un peu mieux les abeilles sauvages de la Manche et il reste certainement des espèces à découvrir, mais pourrons nous continuer cet inventaire ? Nous constatons hélas toutes les menaces qui pèsent sur ces différentes espèces.

Abeille Megachile maritima mâle sur chardon bleu, Eryngium maritimum. (Photo Philippe Scolan)

Si chacune a su développer au fil de l’évolution une spécialisation écologique plus ou moins forte cela les rend malheureusement très sensibles aux bouleversements locaux et globaux très rapides causés par les activités humaines.

La perte de sites de nidification liée à l’artificialisation galopante des terres agricoles et des zones naturelles est une des causes du déclin constaté. Le fauchage de la végétation des bords de routes, bermes et accotements, et le broyage des talus et haies en est une autre.

Mais l’utilisation massive des herbicides, défoliants, insecticides et autres pesticides a également un impact très important sur les populations d’abeilles sauvages et plus largement sur tous les insectes et tous les êtres vivants qui en sont dépendants comme les oiseaux, les batraciens, les chauves-souris…

Quelle place pour la nature sauvage ? (Photo Philippe Scolan)

Cela détruit nombre des sites potentiels de nidification, fait disparaître les fleurs essentielles à leur alimentation et les intoxique de façon directe par le contact avec ces produits neurotoxiques et perturbateurs endocriniens.

De nombreuses études nationales ou internationales montrent régulièrement et de façon de plus en plus alarmante l’effondrement du vivant. Malheureusement peu de médias s’en font l’écho.

Ainsi, selon une étude1 publiée fin octobre dans la prestigieuse revue scientifique britannique Nature, la biomasse des arthropodes a diminué de 67 % dans les prairies et de 41 % dans les forêts au cours de la dernière décennie dans trois régions en Allemagne !

La biomasse étant la masse totale des organismes vivants présents à un moment donné dans les biotopes étudiés, c’est dire la catastrophe !

C’est l’étude la plus ambitieuse et la plus précise conduite à ce jour sur le déclin des insectes (et des arthropodes en général) ; elle montre, au-delà du doute raisonnable, que le crash en cours des populations d’invertébrés terrestres est plus rapide encore que les estimations publiées jusqu’à présent.

Ces résultats montrent donc un déclin de grande ampleur de la biomasse arthropode, de l’abondance et du nombre d’espèces à travers les niveaux trophiques, cet effondrement se répercute tout le long de la chaîne alimentaire.

Or les arthropodes représentent le plus grand nombre d’espèces animales puisque cet embranchement inclut notamment les araignées et les insectes. Leur rôle dans le fonctionnement des écosystèmes est donc considérable et l’effondrement de leur population peut avoir des répercussions sur toutes les autres composantes de la biosphère.

Il y a un an, une étude2 hollandaise évoquait une baisse de 75 % de la biomasse des insectes volants en 27 ans. Et tout récemment, aux États-Unis, des scientifiques3 constatent une baisse de 83 % de l’abondance des coléoptères en 40 ans dans une forêt du New Hampshire.

Les études4 pointant du doigt les effets de l’agriculture intensive et de l’utilisation massive de pesticides sur la biodiversité se multiplient.

Deux d’entre elles, menées ces dernières années par le Muséum national d’histoire naturelle sur tout le territoire français et par le CNRS à l’échelle locale, présentent à leur tour un bilan catastrophique : de nombreuses espèces d’oiseaux sont en déclin dans tous les milieux, et clairement en chute libre dans le milieu agricole. Les oiseaux communs des campagnes françaises ont perdu 33 % de leurs effectifs depuis 2001 !

Le rapport5 mondial de l’IPBES publié en mai 2019 confirme le déclin alarmant de la nature.

L’IPBES ou Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques est un groupe international d’experts sur la biodiversité, c’est un peu l’équivalent du GIEC pour le climat.
Son président a déclaré : « La santé des écosystèmes dont nous dépendons, ainsi que toutes les autres espèces, se dégrade plus vite que jamais. Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans le monde entier ».

Que dire de plus ?

C’est à nous d’exiger de nos politiques des mesures rapides et radicales pour nous sauver du désastre.

Et l’interdiction de tous les pesticides de synthèse est une des étapes essentielles.

Nous voulons des coquelicots !

Philippe Scolan

Le mouvement Nous voulons des coquelicots

Le site officiel Nous voulons des Coquelicots.
Signons et faisons signer l’appel sur le site https://nousvoulonsdescoquelicots.org/l-appel/
Sur Facebook : Nous voulons des coquelicots à Coutances et Nous voulons des coquelicots dans la Manche

Sources

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Lien pour marque-pages : Permaliens.

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