L’érosion de la loi littoral
par les sénateurs de la Manche
Profitant très paradoxalement de la discussion de la proposition de loi portant « adaptation des territoires littoraux au changement climatique », le sénateur Philippe Bas a fait adopter le 11 janvier par le Sénat, un amendement, qui affaiblit sensiblement la loi littoral. Mais il est encore temps de revenir à la raison, avec l’intervention prochaine des députés.
Le sénateur dit ne pas vouloir remettre en cause la loi littoral, alors qu’il la combat frontalement. Cet amendement, malgré les apparences, ne concerne pas que des détails, et encore moins des adaptations. Il affaiblit considérablement les protections prévues par cette loi. Il s’agit notamment des dispositions fondamentales de la loi littoral préservant les milieux littoraux du mitage. Tout en prévoyant des exceptions, la loi littoral limite l’extension de l’urbanisation en continuité des agglomérations et des villages existants. L’amendement y porte atteinte en favorisant l’urbanisation en dehors de ces secteurs, en permettant l’urbanisation autour de tous les hameaux, aussi modestes soient-ils.
Cette loi n’est pas seulement une loi de protection des paysages. Elle encadre l’urbanisation du littoral pour préserver la nature et l’homme. Elle est née des erreurs passées.
Vouloir favoriser l’urbanisation du littoral à tout prix, est irresponsable dans le contexte actuel.
C’est ajouter de nouvelles difficultés face à l’érosion marine et l’élévation du niveau des mers, en exposant toujours plus d’urbanisation à celle-ci. C’est encore contribuer à augmenter les dépenses publiques pour la protection des biens, notamment privés.
C’est enfin augmenter la pression sur les milieux sensibles du littoral, au détriment des communes rurales qui se désertifient.
La loi portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique est, au contraire, l’occasion de renforcer les protections de la loi littoral en prenant acte du recul inéluctable du trait de côte.
Nous osons espérer que cet amendement sera rejeté par les députés, notamment ceux de la Manche, lors du retour du texte devant l’Assemblée nationale. Dans un régime parlementaire démocratique, la loi est censée être l’expression de la volonté générale. Or un sondage IFOP de 2014 faisait état de l’opposition de 91 % de la population française à l’ assouplissement de la loi littoral.